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Des batteries optimisées grâce aux nanotechnologies

Dans l’optique d’une mobilité respectueuse de l’environnement, les batteries permettant de stocker le courant issu de sources d’énergie renouvelables ne cessent de gagner en importance. Pourtant, leur efficacité est limitée par leur conception. Des physiciennes et physiciens de l’Institut Adolphe Merkle de Fribourg ont développé des électrodes de batteries plus efficaces grâce à une nanostructure inédite : les tests effectués ont révélé une capacité de stockage nettement supérieure ainsi qu’une vitesse de charge accrue.

Résumé du projet de recherche « Batteries lithium-ion nanostructurées ».
Les batteries lithium-ion qui équipent nos téléphones et nos ordinateurs portables nous permettent de travailler partout. Ces batteries pourraient toutefois être nettement plus efficaces.
Les batteries lithium-ion qui équipent nos téléphones et nos ordinateurs portables nous permettent de travailler partout. Ces batteries pourraient toutefois être nettement plus efficaces. Shutterstock
En un coup d’œil

En un coup d’œil

  • Les batteries lithium-ion courantes manquent encore d’efficacité pour certaines applications. Pour de nombreux usages, elles sont aussi trop encombrantes et trop lourdes.
  • Des physiciennes et physiciens de Fribourg viennent de développer deux nouveaux procédés de fabrication des électrodes. Grâce à une surface nanoporeuse, elles rendent les batteries plus performantes.
  • Bien qu’elles aient seulement été testées en laboratoire pour le moment, ces méthodes sont en principe adaptées à une production industrielle et pourraient être intégrées aux procédés existants.

Notre mode de vie moderne dépend fortement des batteries lithium-ion. Que ce soit dans le téléphone portable, la tablette ou l’ordinateur portable, elles nous fournissent de l’énergie où que nous soyons. Cependant, dès lors qu’il s’agit de stocker de grandes quantités d’énergie, par exemple pour recueillir l’électricité excédentaire produite par les sources d’énergie renouvelables comme le soleil ou le vent, ou bien pour la propulsion des véhicules électriques, elles s’avèrent vite trop volumineuses, trop lourdes et trop chères. Cela n’est guère surprenant si l’on pense que, malgré leur importance dans notre univers ultra-technologique, les batteries n’ont pratiquement pas évolué depuis plus d’un siècle. Ce n’est pas pour rien si Ullrich Steiner, professeur de Physique des matériaux mous à l’Institut Adolphe Merkle de Fribourg, les qualifie de « low-tech devices » (équipements à faible technicité). Avec son groupe de recherche, il travaille au développement des batteries et en particulier de leurs électrodes. Avec son équipe de chercheuses et de chercheurs, il vient de découvrir un moyen de doter les électrodes de pores nanométriques rendant les batteries nettement plus efficaces.

Optimiser l’adhésion des ions aux électrodes

Sur les batteries actuelles, la cathode est généralement fabriquée dans un oxyde métallique de lithium, tandis que l’anode est en graphite de lithium. Le courant circule grâce à la migration d’ions lithium entre les deux électrodes. Le processus de fabrication industrielle des électrodes est relativement simple : les matériaux sont habituellement broyés pour former une pâte qui est ensuite laminée. La fabrication donne au matériau une surface rugueuse et poreuse, qui facilite les mouvements des ions lithium entre les électrodes et permet à davantage d’ions d’accéder à la surface des électrodes et de s’y accumuler. Plus ce processus est efficace, plus la batterie sera performante et se chargera rapidement.

Cette accumulation des ions sur les électrodes peut toutefois encore être considérablement améliorée comme l’ont montré Ullrich Steiner et son équipe. Ils ont développé deux méthodes distinctes, grâce auxquelles ils peuvent doter la surface des électrodes de pores de façon beaucoup plus ciblée : d’un côté avec des pores un peu plus grands permettant la diffusion des ions, de l’autre avec des pores adaptés à la taille des ions lithium, c’est-à-dire ne dépassant pas quelques nanomètres. Ces nanopores doivent permettre aux ions de se fixer plus facilement sur les électrodes.

Les physiciennes et physiciens fribourgeois ont perfectionné à cet effet un procédé qu’ils avaient déjà utilisé préalablement pour la fabrication de matériaux destinés aux installations photovoltaïques. Ils ont mélangé des polymères synthétiques avec une substance chimique qui, lorsqu’elle est chauffée, se transforme en oxyde de titane – un matériau largement utilisé pour les électrodes. Le chauffage contrôlé de ce mélange permet d’obtenir une substance solide composée de microbilles d’oxyde de titane, dans lesquelles le mélange de polymères aura laissé de fins nanopores. Les essais menés par les chercheuses et chercheurs ont révélé que la taille de ces pores dépend des polymères utilisés. En employant différents polymères, il leur a ainsi été possible de fabriquer des billes présentant des pores de taille variable, de l’ordre de 3 à 40 nanomètres de diamètre. Des tests menés en utilisant ces nouveaux matériaux en guise d’anode dans une cellule électrochimique, une sorte d’archétype de batterie, ont montré que ce sont avant tout les pores mesurant 14 nanomètres ou plus qui permettaient d’améliorer les performances de stockage d’électricité.

Processus de fabrication : deux polymères différents sont combinés avec un produit chimique, précurseur de dioxyde de titane. Le séchage à des températures de 400 à 500°C qui s’en suit entraîne la formation de billes de dioxyde de titane parsemées de pores de taille nanométrique.
Processus de fabrication : deux polymères différents sont combinés avec un produit chimique, précurseur de dioxyde de titane. Le séchage à des températures de 400 à 500°C qui s’en suit entraîne la formation de billes de dioxyde de titane parsemées de pores de taille nanométrique. M. Fischer

Des batteries plus performantes

Le même procédé a permis à l’équipe de recherche de synthétiser un matériau de cathode en lithium-fer-phosphate, qu’elle a pourvu de nanopores de façon tout aussi ciblée. Intégré à une demi-cellule, c’est-à-dire en quelque sorte une moitié de batterie, ce matériau a entraîné une amélioration de l’ensemble des caractéristiques de la batterie : capacité de stockage, vitesse de charge et stabilité du cycle (effet des charges et décharges répétées sur la capacité de la batterie).

Selon les chercheuses et chercheurs, les essais menés avec ce second matériau d’électrode sont très importants car ils démontrent que le procédé ne se limite pas à un matériau donné, mais peut servir à fabriquer divers types d’électrodes – un préalable important à une future intégration dans une production à l’échelle industrielle.

Enfin, les physiciennes et physiciens fribourgeois ont utilisé le même procédé pour produire une électrode en titanate de lithium – un matériau d’anode efficace, mais plus difficile à fabriquer que l’oxyde de titane. Cette électrode est encore en cours de test, mais les premiers résultats indiquent une capacité de stockage encore améliorée.

Représentation schématique d’une batterie avec une anode et une cathode en matériaux nanoporeux : les ions lithium circulent efficacement entre les deux électrodes. Les pores des électrodes en augmentent la surface et, par conséquent, la capacité de la batterie.
Représentation schématique d’une batterie avec une anode et une cathode en matériaux nanoporeux : les ions lithium circulent efficacement entre les deux électrodes. Les pores des électrodes en augmentent la surface et, par conséquent, la capacité de la batterie. M. Scherer

Production plus respectueuse de l’environnement

L’équipe du professeur Steiner a également expérimenté un procédé de fabrication plus complexe, mais plus respectueux de l’environnement car ne nécessitant pas l’emploi de solvants organiques. Elle a collaboré à cet effet avec un groupe de recherche de l’Université de Nottingham, qui avait déjà acquis une certaine expérience avec ce que l’on appelle le dioxyde de carbone supercritique, un dioxyde de carbone liquide qui ne se forme qu’à très haute pression. Son point fort : les matériaux organiques, tels que les polymères utilisés, s’y dissolvent extrêmement bien, ce qui conduit à la formation de fins nanopores lors du processus de synthèse. Les chercheuses et chercheurs n’ont pas encore testé les électrodes mais, en raison de la structure nanométrique de la surface, ils s’attendent à ce que ce matériau améliore lui aussi sensiblement les propriétés des batteries.

Batteries made in Switzerland

Pour l’instant, les deux procédés ont uniquement été testés en laboratoire, mais leur évolutivité leur permettrait en principe d’être intégrés à des chaînes de production existantes. Pour Ullrich Steiner, le problème relève davantage du fait que les batteries sont bien produites à l’échelle industrielle en Suisse, mais avec des composants venant de l’étranger. En effet, ceux-ci sont généralement importés de pays asiatiques comme la Chine ou le Japon. Il estime néanmoins que ces nouveaux procédés représentent un grand potentiel pour la production suisse de batteries. Des solutions de stockage plus performantes pourraient en effet contribuer à atteindre les objectifs de la Stratégie énergétique 2050.

Produits du projet

Contact et équipe

Prof. Ullrich Steiner

Adolphe Merkle Institute
Chemin des Verdiers
B323
1700 Fribourg

+41 26 300 95 03
ullrich.steiner@unifr.ch

Ullrich Steiner

Projektleiter

Xiao Hua

Andrea Palumbo

Le contenu de ce site représente l’état des connaissances au 17.12.2018.