Guide pour un changement de comportement

Les humains ne sont ni simples receveurs d'ordres ni robots. Mais au bout du compte, le succès de la mise en œuvre de la Stratégie énergétique 2050 dépend de la capacité à séduire et à encourager les individus à adopter des modes de vie économes en énergie. En effet, les objectifs en matière de protection du climat et de réduction de la consommation d'énergie ne peuvent être atteints que si les comportements des citoyens changent à long terme.

La psychologie sociale et la sociologie en ont jeté les bases. Les deux sciences cherchent à caractériser les individus en fonction de leur comportement.

Comment une personne modifie-t-elle son comportement ?

Timo Ohnmacht et son équipe de la Haute école spécialisée de Lucerne (HSLU) ont pu démontrer que des mesures personnalisées permettent d'influencer différents groupes cibles en matière de style de vie respectueux des ressources énergétiques.

Les chercheurs spécialisés dans le domaine de la sociologie des transports ont combiné deux approches propres aux sciences sociales : d'une part, les modèles dits de phase qui permettent de décrire les changements de comportement et, d'autre part, les facteurs d'influence socio-psychologiques qui soutiennent le changement de comportement.

« La route est-elle trop raide pour moi ? »

Définition des différentes phases à l'exemple du cyclisme :

• Phase 1 : la personne n'a pas encore envisagé de faire du vélo. L'objectif est de développer chez cette personne le souhait d'un changement de comportement ; dans notre exemple, le souhait de commencer à faire du vélo.
• Phase 2 : après l'expression du souhait, c'est la mise en œuvre qui est au premier plan des considérations. La personne pèse le pour (« le vélo est bon pour la santé ») et le contre (« la route conduisant à mon lieu de travail n'est-elle pas trop raide pour moi ? »)
• Phase 3 : la volonté de mise en œuvre se concrétise. Les premiers essais ont déjà eu lieu et des résolutions sont en cours d'élaboration : « À partir de la semaine prochaine, je me rendrai au travail à vélo tous les jours. »
• Phase 4 : la personne a réussi une mise en œuvre à long terme de son désir. Dans cette dernière phase, le défi consiste à fixer son changement de comportement et à ne pas retomber dans les phases précédentes.

Questionnaire à l'attention de 7000 personnes

Dans une large mesure, ce sont des facteurs socio-psychologiques qui déterminent si une personne se comporte d'une manière respectueuse de l'environnement. Dans leur étude, les chercheurs de la Haute école spécialisée de Lucerne ont recensé neuf de ces facteurs. Il s'agit, par exemple, de normes sociales, c'est-à-dire d'attentes exprimées par des personnes de référence, ou alors d'émotions ressenties dans le contexte d'un comportement respectueux des ressources.

Voilà donc pour la théorie. Le département Économie de la Haute école spécialisée de Lucerne a ensuite mis au point un questionnaire visant à identifier les phases dans lesquelles les personnes interrogées se perçoivent pour six domaines de comportement, tous liés à l'économie d'énergie : 1) cyclisme, 2) utilisation prolongée d'un vieux téléphone portable, 3) choix d'une maison économe en énergie, 4) réduction de la consommation de viande, 5) utilisation des transports publics, 6) achat d'articles de seconde main.

Où se trouve l'atelier de réparation de téléphones portables le plus proche ?

Ce questionnaire a été envoyé à 3500 personnes à Lucerne, et à un même nombre à Bienne. Le taux de réponse s'est avéré élevé : à Bienne, 30 % des destinataires ont rempli le questionnaire. À Lucerne, ce chiffre a même atteint 50 %.

L'une des conclusions de cette étude sur le terrain est que les mesures sont efficaces si elles tiennent compte de l'appartenance à une phase ainsi que des facteurs d'influence socio-psychologiques. Par exemple : si une personne s'intéresse à la pratique du vélo mais ne se sent pas suffisamment en forme pour en faire, une information concernant la location saisonnière de vélos électriques exerce une influence positive sur cet individu.

Deux personnes sur cinq souhaitent garder leur vieux téléphone portable

Toutefois, la mise en œuvre de la Stratégie énergétique 2050 ne peut réussir qu'en augmentant la proportion de la population en phase 4, donc la phase dans laquelle les individus cherchent à fixer à long terme leur comportement modifié.

L'étude présentée ici démontre qu'en tenant compte des facteurs d'influence socio-psychologiques, il est effectivement possible d'augmenter l'appartenance à la phase 4. L'une des mesures à envisager serait, par exemple, l'annonce de la disponibilité d'ateliers de réparation de téléphones portables. Un modèle de simulation a indiqué que ces informations conduiraient, à Lucerne, à une augmentation de l'affiliation à la phase 4 : de 48,8 % avant l'annonce de la disponibilité d'ateliers de réparation, à 60,6 % après la diffusion de l'information. Pour ce projet, la Haute école spécialisée de Lucerne a travaillé en étroite collaboration avec les villes de Lucerne et de Bienne. Les lignes directrices (« toolbox ») pour les six domaines d'action (par exemple pour une utilisation prolongée des téléphones portables) peuvent également être exploitées dans d'autres villes.