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Politique énergétique basée sur un système d'encouragement ou incitatif : laquelle est moins chère ?

Pour atteindre les objectifs climatiques et énergétiques de la Confédération, la Suisse peut soit encourager un comportement plus économique moyennant des taxes d'incitation, soit aider les nouvelles technologies à percer par l'intermédiaire de réglementations et de subventions. Des chercheurs de l'ETH Zurich et du bureau de conseil Ecoplan ont déterminé laquelle des deux approches est la plus rentable en termes macro-économiques.

Résumé du projet de recherche « Politique énergétique basée sur un système d’encouragement ou incitatif ».
Que la Suisse atteigne ses objectifs énergétiques moyennant des subventions ou des impôts représente une grande différence sur le plan financier.
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En un coup d’œil

En un coup d’œil

Incitation ou encouragement

  • Il existe deux manières d'atteindre les objectifs climatiques et énergétiques : l'incitation ou l'encouragement.

Les taxes d'incitation sont moins chères que la politique d'encouragement

  • Le coût économique global de la réalisation des objectifs est cinq fois moins élevé avec des taxes d'incitation qu'avec des subventions.
  • La raison en est que les coûts des subventions sont cachés, alors que les taxes d'incitation sont reversées aux consommateurs et aux entreprises sous forme de remboursements.

Les taxes d'incitation ne présentent pas les mêmes bénéfices pour tous

  • Les propriétaires et les ménages en zone rurale en profitent un peu moins que les ménages en zone urbaine ou péri-urbaine.
  • Les ménages consacrant une part relativement faible de leur budget à l'achat de sources d'énergie et ceux qui dérivent une grande partie de leur revenu des prestations de l'État, notamment des prestations de l'AVS, en bénéficient plus fortement.

Avec sa Stratégie énergétique 2050, la Suisse vise à réduire de 43 % la consommation d'énergie d'ici 2035. Il existe plusieurs moyens d'atteindre cet objectif : la Confédération et les cantons ont par exemple la possibilité de prélever des impôts sur l'énergie, ce qui rendrait la consommation plus coûteuse. Ou alors, les autorités peuvent mettre en place des prescriptions et accorder des subventions, par exemple sous forme de subsides pour la rénovation de bâtiments, ce qui favoriserait les économies d'énergie.

Des chercheurs de l'ETH Zurich et du bureau de conseil Ecoplan ont déterminé laquelle de ces deux approches est la moins chère pour l'ensemble du secteur économique. Ils ont découvert que les taxes d'incitation représentent la solution de choix, bien que les coûts de l'énergie pour les ménages s'en trouvent augmentés, car les consommateurs récupèrent une grande partie de leur argent sous forme de remboursements. Les calculs indiquent que la réalisation des objectifs fixés moyennant des taxes d'incitation engendrerait des coûts annuels totaux de près d'un milliard de francs suisses, ce qui correspond à 0,23 % des dépenses annuelles de consommation en Suisse. Un ménage moyen devrait donc payer CHF 292. La situation est différente lorsque la réduction de la consommation d'énergie à la valeur cible se fait au moyen de subventions : cette stratégie coûterait plus de 5,5 milliards de francs, soit plus de cinq fois plus. Pour un ménage moyen, cela représente des frais annuels de CHF 1548.

Réduire les émissions et la consommation d'énergie

Dans le cadre de sa politique énergétique et climatique, la Suisse s'est engagée en faveur d'un développement durable afin de réduire les émissions de dioxyde de carbone et la consommation énergétique. Toutefois, lors de l'élaboration de stratégies régulatrices politiquement réalisables pour atteindre ces objectifs, il est nécessaire de préserver l'équilibre entre l'efficacité économique et l'équilibre social. En outre, les instruments de gestion doivent être reconnus et acceptés au cours des processus politiques, en particulier dans une démocratie directe telle que la Suisse. Par conséquent, le succès d'une stratégie dépend non seulement de son efficacité, mais aussi de son équité, c'est-à-dire des effets de distribution sur les différents types de ménages. Une telle analyse économique strictement quantitative n'avait jamais été réalisée. Pour la première fois, des chercheurs ont maintenant examiné de manière plus détaillée cette situation en se fondant sur deux paradigmes :

  • Paradigme de régulation : ce paradigme est synonyme d'une régulation globale basée sur le marché, qui s'appuie sur une taxe CO2 et une taxe sur l'électricité.
  • Paradigme d'encouragement : ce paradigme désigne une régulation ciblée qui vise soit à utiliser les ressources de manière plus efficace (par exemple en fixant des limites d'émissions pour les nouvelles voitures ou des prescriptions d'efficacité pour les nouveaux appareils électriques), soit à créer des instruments d'encouragement fondés sur le marché (notamment des subventions pour les programmes de construction).

Analyses de microsimulation

Afin de comparer les deux approches, les chercheurs ont mis au point un cadre numérique qui combine un modèle informatique d'équilibre général et une analyse de microsimulation à l'échelle des ménages. L'avantage de cette combinaison est qu'elle permet d'analyser les implications des réformes politiques relatives à la rentabilité macro-économique, et qu'elle fournit parallèlement une perspective très détaillée des répercussions sur les ménages. Le cadre de modélisation intégré offre une riche représentation de l'hétérogénéité des ménages, tout en tenant compte d'importants liens intersectoriels, par exemple entre les ménages et l'industrie, et des rétroactions du marché dépendantes des prix pour l'ensemble du secteur économique.

L'incitation revient moins cher que le subventionnement

Les chercheurs ont constaté qu'au niveau macro-économique, les instruments de régulation basés sur le marché sont plus efficaces. Par rapport aux programmes de subventions, les taxes d'incitation divisent par un facteur supérieur à cinq les coûts d'ajustement économique. Cette différence importante est due au fait que les taxes incitatives influencent toutes les décisions prises par les ménages et les entreprises en matière d'énergie. Les instruments de régulation conduisent donc à des coûts globaux nettement inférieurs à ceux engendrés par des instruments d'encouragement sélectif. Les coûts globaux plus élevés des instruments d'encouragement sont occultés, car le prix de l'énergie n'en est pratiquement pas affecté, alors qu'il augmente dans le cadre des mesures incitatives. Au bout du compte, toutefois, ces frais supplémentaires doivent être acquittés par les ménages et les entreprises.

Au niveau des ménages, les effets des deux stratégies varient en fonction des comportements de dépense et des sources de revenu. La répartition des effets sur les ménages est toutefois plus large dans le cas des instruments incitatifs. Presque tous les ménages perdent au change avec les stratégies d'encouragement, alors que la régulation a des conséquences positives pour près d'un tiers d'entre eux. Les ménages consacrant une part relativement faible de leur revenu à l'achat de produits énergétiques ou dont une part élevée des revenus sont dérivés de transferts gouvernementaux (p.ex. de l'AVS) profitent des instruments de régulation. Les ménages dont le revenu total est faible bénéficient également d'une réduction disproportionnée par habitant.

Les impacts sociaux moyens des instruments d'encouragement sont presque identiques pour tous les groupes socio-économiques pris en compte dans l'analyse (revenus, propriétaires ou locataires, retraités ou actifs, ménages en zone rurale, urbaine ou péri-urbaine). Dans le cas des instruments de régulation, leur incidence dépend largement de la manière dont les recettes fiscales, par exemple celles issues de la taxe sur le CO2, sont redistribuées. Les ménages de retraités bénéficient de petits avantages sociaux, les propriétaires sont plus mal lotis que les locataires et les ménages vivant en milieu rural se retrouvent désavantagés par rapport à ceux des villes et agglomérations. Au niveau macro-économique, cependant, les taxes d'incitation coûtent moins à la société.

Contact et équipe

Prof. Sebastian Rausch

Centre for Energy Policy Economics (CEPE)
ETH Zürich
Zürichbergstrasse 18
ZUE E7
8032 Zürich

+41 44 632 63 59
srausch@ethz.ch

Sebastian Rausch

Projektleiter

Christoph Böhringer

Mirjam Kosch

Florian Landis

André Müller

Renger van Nieuwkoop

Le contenu de ce site représente l’état des connaissances au 18.06.2019.